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du 16 janvier au 27 avril 2014
« Quand je photographie quelque chose, je suis cette chose… comme si je priais ».
Du 16 janvier au 27 avril 2014, la Fondation Henri Cartier-Bresson présente une importante exposition de Guido Guidi, figure majeure de la photographie contemporaine italienne, qui considère la photographie comme un prolongement du regard, une manière de vivre. Pour la première fois en France, les quarante ans de carrière du photographe, pionnier du renouveau de la photographie du territoire, sont retracés. Sur deux étages, les expérimentations en noir et blanc des années soixante-dix côtoient les séries couleur emblématiques telles que In between cities, A New map of Italy ou Preganziol.
Né en 1941 à Cesena, au Nord-est de l’Italie, Guido Guidi souhaite devenir architecte ou peintre, il suit alors des cours d’architecture à l’IUAV (institut universitaire d’architecture de Venise) puis au Corso Superiore di Disegno Industriale de Venise. Parmi ses professeurs, des architectes de renom comme Carlo Scarpa ou Luigi Veronesi qui auront une influence majeure sur son travail. Au cours de cette formation, il commence à s’intéresser à la photographie pour s’y consacrer totalement à partir du milieu des années soixante. Pendant les premières années de sa carrière, attiré par le travail de Walker Evans, de Lee Friedlander et par le néoréalisme italien, il s’essaie à la photographie en noir et blanc et réalise des séries dans la mouvance de l’art conceptuel de l’époque.
À partir de 1970, il travaille comme photographe pour le département d’urbanisme de l’université de Venise et se concentre sur le paysage contemporain et ses transformations. Il abandonne alors le noir et blanc et se consacre au travail à la chambre avec un film couleur grand format. Il souhaite documenter l’Italie, enregistrer la vie italienne non pas en s’intéressant aux espaces culturels mais en se concentrant sur les espaces périphériques, à la marge. Pour Guidi, « travailler à la frontière implique de travailler en étant privé de certitudes et d’observer des situations non codifiées, incertaines, ouvertes, mal comprises ou incomprises. Insister sur la marge, et même la photographie a une marge, cela signifie porter un regard plus large sur les choses, sans préjugés ». Dans son essai, Marta Dahò souligne que Guido Guidi « ne cherche pas à monumentaliser ces espaces ; il essaie d’observer ce qu’il y a à côté, au-dessus ou à l’ombre de ces espaces ». Pour répondre à ses interrogations, il met en œuvre des enquêtes personnelles menées sur le long terme et participe à des commissions publiques sur le territoire.
Dans un premier temps, il se focalise sur les espaces quotidiens et familiers qui se trouvent autour de lui, de sa ville. Pour lui, « les périphéries des villes étaient des sortes de zones libres qui offraient des possibilités infinies ». Il réalise ainsi ses premières enquêtes photographiques personnelles en Emilie-Romagne, à Ravenne, à Porto Marghera. Afin de documenter l’expansion de l’union européenne et les nouveaux territoires urbains, il n’hésite pas à s’éloigner; en 1993, il entreprend avec l’architecte Marco Venturi un périple en Europe. Lors de trois voyages de deux semaines, ils suivent le maillage routier qui relie Saint-Pétersbourg à Finisterra (Espagne). Ce voyage aboutira en 2003 à la publication d’un livre In Between cities. Un itinerario attraverso l’Europa 1993-1996. Dans ces photographies, que l’on retrouve en partie au premier étage de l’exposition, Guidi s’intéresse aux espaces indéfinis entre les villes européennes, territoires en mouvement, sans cesse transformés par l’homme.
Dès les années quatre-vingt, au moment où s’installe en Italie un dialogue entre photographie et urbanisme, il est appelé à participer à plusieurs projets sur la transformation et l’évolution du territoire, financés par les services publics. À partir de 1986, Guido Guidi s’oriente également vers la pédagogie : il est régulièrement invité dans les universités italiennes pour mener des cours ou des ateliers et enseigne depuis la fin des années quatre-vingt à l’Académie des beaux-arts de Ravenne et à l’Institut universitaire d’architecture de Venise. En 1989, il crée avec Paolo Costantini et William Guerrieri l’association Linea di Confine per la fotografia contemporanea qui fait le lien entre photographie et paysage, en organisant par exemple des ateliers avec des photographes de renommée mondiale comme Stephen Shore ou Lewis Baltz et en publiant leurs recherches.
Guido Guidi est toujours resté attaché à l’architecture et a intégré la question dans nombre de ses projets. Il réalise par exemple une série sur la Tomba Brion, monument funéraire réalisé entre 1970 et 1978 par l’architecte et professeur du photographe, Carlo Scarpa. Guidi a photographié pendant plusieurs années le monument, à différents moments du jour et de l’année, explorant ainsi les notions de temps et d’espace : « ce qui m’intéresse dans la photographie, c’est la relation entre les objets et l’espace ». Dans ces projets liés à l’architecture, Guido Guidi utilise la photographie non pas pour magnifier les œuvres des architectes mais comme un moyen pour se rapprocher de leurs intentions, de leur imaginaire.
L’œuvre de Guido Guidi est encore mal reconnue en dehors de l’Italie. Ses publications sont quant à elles très recherchées. Parmi les plus importantes, il faut citer Varianti publié en 1995 et qui retrace le début de la carrière du photographe depuis son travail en noir et blanc jusqu’aux premières séries couleur.La monographie A New Map of Italy, dont est extraite une partie des tirages présentés au deuxième étage, est publiée en 2011. Guido Guidi explique : «pour ma recherche pour ‘A New Map of Italy’, j’ai préféré les endroits alternatifs, en lieu et place du cliché des destinations de vacances. Mon attention s’est toujours portée sur le paysage vu et vécu au quotidien. En même temps, j’ai choisi d’éviter tout stéréotype folklorique ou mythe historique, et de me concentrer sur la simple réalité actuelle ». Pour Gerry Badger, qui introduit l’ouvrage, les photographies de cette série sont originales, compliquées dans leur simplicité, ingénieuses et profondément ressenties. Elles sont peut-être quelconques mais aussi vraiment magnifiques.
L’exposition est accompagnée d’un catalogue publié par MACK avec une introduction d’Agnès Sire, commissaire de l’exposition et un essai de Marta Dahò, historienne de la photographie.