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Photographe le plus célèbre du vieux Paris, Eugène Atget (1857- 1927) commence par produire des « documents pour artistes », comme l’énonce la plaque apposée sur son atelier dans les années 1890. Les peintres ont besoin d’arbres, d’objets, de scènes de rues pour leurs compositions. Vers 1897-1898, il commence à photographier Paris de manière systématique. L’époque s’intéresse au patrimoine de la capitale et la commission du Vieux Paris commande à Atget plusieurs séries qu’il nomme Paris pittoresque, L’art dans le vieux Paris, Environs… Doté d’un imposant dispositif comprenant une chambre à soufflet avec un châssis chargé de plaques de verre, le photographe saisit la topographie d’une ville qui change. Petits métiers, étalages, cours d’immeubles, heurtoirs, charrettes, ruelles, cafés, chiffonniers de la zone, jardins urbains, parcs à demi abandonnés, quais de la Seine, cette obsessionnelle recherche fixe le détail de l’imprévu ; il en émane un sentiment de nostalgie, d’immédiate proximité, mais aussi une grande poésie. Atget procède de manière méthodique, progressant par arrondissements et quartiers, comme en témoignent ses carnets.
Préférant les lumières du petit matin, le photographe réalise des milliers d’images destinées aux bibliothèques et aux musées. En 1906, la bibliothèque historique de la ville de Paris lui commande un travail sur la topographie du vieux Paris. Son cheminement montre des rues souvent désertes, des façades impénétrables, des fenêtres ouvertes sur de sombres intérieurs : le monde est comme endormi, il y a peu d’habitants, qui apparaissent tels des spectres derrière leur fenêtre. L’absence humaine dramatise le réel.
Les objets sont eux aussi dotés d’une présence insolite: chaussures accrochées dans une vitrine, paniers, fouet et rênes suspendus mais sans cocher… Documents ou œuvres d’art? Atget se qualifie d’auteur-éditeur: sa maîtrise absolue du cadrage, son attention aux lignes des bâtiments, aux détails inattendus, aux choses abandonnées élaborent un univers singulier. Chez Atget, la photographie est réduite à elle-même, elle n’a aucun apprêt.
Dans les années 1920, son intérêt pour les objets du quotidien sortis de leur fonction fascine les surréalistes. Élève de Man Ray, l’Américaine Berenice Abbott est la première à comprendre son œuvre. Elle acquiert à sa mort plus de mille plaques qu’elle vendra en 1968 au MoMA de New York, favorisant la diffusion de ses images aux États-Unis. Par son regard frontal, sa vision qui mêle imaginaire et réel, Atget a inventé la photographie moderne. Cet ouvrage présente environ 170 images de la collection du musée Carnavalet et offre une promenade onirique et esthétique, une jouissance de l’œil et un plaisir de voir Paris comme le souligne le titre de l’exposition à la Fondation HCB qui accompagne cette publication.
Photographies
Eugène Atget
Textes
Anne de Mondenard, responsable du département Photographies et Images numériques, musée Carnavalet – Histoire de Paris
Agnès Sire, directrice artistique, Fondation HCB
Peter Galassi, ex-directeur du département photographies du MoMA New York
Relié
21 x 26 cm
Environ 170 photographies
Disponible en français
Envoi en Europe uniquement
Images : © Atelier EXB